Communication et protection données carte grise
Publié par Eplaque - 11 min de lecture ⏳
Le 15/03/2021 - Mis à jour le 03/03/2023
Depuis 2009, les données concernant l’immatriculation sont centralisées dans le SIV. À ce titre, elles sont régulièrement communiquées et consultées par tous les acteurs qui ont accès au fichier SIV. Cela pose évidemment des questions en termes de protection des données, de leur communication, de droit à l’accès. Voici ce qui est prévu par le législateur en la matière.
Communication des données aux administrations
Les organismes sociaux (CPAM, CAF, URSSAF) disposent-ils d’un droit de communication des données enregistrées dans le SIV ?
L’enregistrement des données relatives à l’autorisation de circuler des véhicules est réalisé sur un traitement informatique centralisé dénommé SIV, conformément à l’article L. 330-1 du code de la route. Les droits et modalités d’accès et de communication à ces données sont principalement encadrés par les articles L. 330-2 et suivants et R. 330-2 et suivants du code de la route, qui n’énumèrent pas les organismes sociaux comme destinataire de ces données.
Toutefois, l’article R. 330-5 prévoit « la communication des informations prévues aux articles L. 330-2 à L. 330-4 aux demandeurs qui disposent d’un droit d’accès en vertu d’une disposition législative particulière ». Les dispositions législatives des articles L. 114-16-1 et/ou L. 114-19 du code de sécurité sociale offrent un droit de communication aux organismes sociaux : ils peuvent donc être destinataires des données du SIV si leur demande s’effectue dans ce seul cadre juridique.
Selon quelles modalités l’administration fiscale dispose-t-elle d’un accès au SIV ?
L’administration fiscale dispose d’un droit d’accès direct aux informations enregistrées dans le SIV en vertu des articles L. 330-2 et R. 330-2 du code de la route, mais également du livre des procédures fiscales. A cette fin, la direction générale des finances publiques (DGFiP) a signé avec la délégation à la sécurité routière une convention de délégation de gestion le 6 avril 2018. Par cette convention de délégation, l’administration fiscale dispose d’un accès direct aux données du SIV, pour réaliser ses missions de contrôle fiscal, d’huissier des finances publiques (possibilité d’inscrire des DVS) et de recouvrement des amendes (possibilité d’inscrire des OTCI).
Les services centraux de la DGFiP peuvent, conformément à l’article 6 de la convention de délégation, subdéléguer à des subordonnés individuellement habilités […] la réalisation des opérations susvisées dans le SIV. Un modèle de fiche individuelle d’habilitation est joint en annexe. La liste des agents qui réaliseront ces opérations sera communiquée au délégant. »
Un accès au SIV peut-il être ouvert par les préfectures pour les agents de la concurrence ?
La publication du décret en Conseil d’État accordant le droit d’accès direct est attendue, pour mettre en œuvre le droit d’accès aux données du SIV pour les « agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour l’exercice de leurs missions en application du présent code et du code de la consommation » au 18° de l’article L. 330-2 du code de la route, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités.
Puis une convention de délégation de gestion sera signée entre la Délégation à la sécurité routière et le DGCCRF permettant de désigner les administrateurs de la DGCCRF qui pourront accorder les droits, sur le même modèle que les délégations signées avec la Direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction de l’immobilier de l’État (DIE).
Accès au SIV par la police
Le droit d’accès aux données enregistrées dans le SIV par les policiers municipaux et aux gardes-champêtres est défini par l’article L. 330-2 du code de la route : ce droit d’accès ne concerne pas l’intégralité des données du SIV. Toutefois, l’annexe I de la circulaire du 3 janvier 2019 ne dispose que les éléments qui sont accessibles techniquement sur le portail police municipal (PPM).
Certains éléments, communicables par saisine des forces de l’ordre, peuvent ne pas figurer sur le PPM. Aussi, en stricte application de la législation, les APJA et GC sont en droit de recevoir toutes informations contenues dans le SIV, dans la limite des deux exclusions suivantes :
- Les informations relatives aux gages constitués sur les véhicules à moteur et aux OTCI ne sont pas communicables au regard du cadre légal
- Les informations demandées ne sont relatives qu’au contrevenant (le titulaire) à la date et heure de l’infraction, dès lors qu’ils sont habilités à constater l’infraction
Un maire peut-il être habilité au portail police municipale ?
Le décret n° 2018-387 du 24 mai 2018, précisant les conditions d’accès aux informations des traitements de données à caractère personnel relatifs au permis de conduire et à la circulation des véhicules, a modifié les articles R. 225-5 et R. 330-2 du code de la route afin de permettre aux agents de police judiciaire adjoints et gardes champêtres d’accéder directement à certaines données du SNPC et du SIV, « aux seules fins d’identifier les auteurs des infractions au code de la route qu’ils sont habilités à constater ». Les conditions d’accès à ce PPM ont été précisées dans le cadre de la circulaire ministérielle du 3 janvier 2019.
Aussi, les dispositions du 5 bis de l’article L. 225-5 et du 4 bis de l’article L 330-2 du code de la route délimitent le champ d’application pour ces autorités : seuls peuvent y être habilités les policiers municipaux, les gardes champêtres et les agents de surveillance de Paris.
Un maire, notamment dans une commune dépourvue de police municipale, ne peut être habilité à consulter ce portail car les dispositions précitées L. 225-5 et L. 330-2 ne le prévoient pas.
Communication des données aux professionnels
La date de première immatriculation du véhicule peut-elle être communiquée aux huissiers ?
L’article L. 330-4 du code de la route dispose que notamment : « Les informations relatives à l’état civil du titulaire du certificat d’immatriculation, au numéro d’immatriculation et aux caractéristiques du véhicule ainsi qu’aux gages constitués et aux oppositions, sont, à l’exclusion de tout autre renseignement, communiquées sur leur demande, pour l’exercice de leur mission : 1° Aux agents chargés de l’exécution d’un titre exécutoire ».
Il peut être considéré que l’information de la date de première immatriculation du véhicule relève de la catégorie « caractéristiques techniques du véhicules » et qu’à ce titre elle peut être délivrée aux huissiers.
Le certificat de situation administrative détaillée et la fiche d’identification du véhicule peuvent-ils être communiqués aux huissiers de justice ?
Il convient de faire la distinction entre l’huissier de justice qui exerce ses missions dans le cadre de l’article L. 330-4 du code de la route, et celui qui exerce ses missions dans le cas d’une vente aux enchères.
A – Éléments communicables aux huissiers agissant dans le cadre de l’article L. 330-4
L’article L.330-4 du code de la route précise que « les informations relatives à l’état civil du titulaire du certificat d’immatriculation, au numéro d’immatriculation et aux caractéristiques du véhicule ainsi qu’aux gages constitués et aux oppositions, sont, à l’exclusion de tout autre renseignement, communiquées sur leur demande, pour l’exercice de leur mission : 1 ° aux agents chargés de l’exécution d’un titre exécutoire […]».
Concernant les gages et les oppositions, il convient de préciser que toutes les informations relatives à un gage constitué ou à une opposition peuvent être communiquées. Ainsi, un huissier peut avoir communication d’un ou des éléments précités sur sa demande, avec copie du titre exécutoire.
En revanche, dans le cas d’une demande de certificat de situation administrative détaillée, si celui-ci comporte des éléments autres que ceux précités, il ne peut être communiqué aux huissiers conformément à l’article L.330-4 du code de la route.
B – Éléments communicables aux huissiers agissant dans le cas d’une vente aux enchères
Pour les véhicules démunis de certificat d’immatriculation et vendus aux enchères, l’article 18 de l’arrêté du 9 février 2009 relatif aux modalités d’immatriculation des véhicules précise que la fiche d’identification du véhicule est délivrée sur présentation de « la demande du mandataire judiciaire ou du commissaire-priseur ou du commissaire aux ventes procédant à la vente » et de « la déclaration de perte ou de vol du certificat d’immatriculation ou toute autre pièce permettant de justifier l’absence du certificat d’immatriculation ».
Ainsi, seuls les commissaires-priseurs, les mandataires judiciaires et les commissaires aux ventes peuvent se voir délivrer sur demande une fiche d’identification du véhicule.
Cependant, l’article 1 de l’ordonnance n°45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers précise que « les huissiers de justice peuvent en outre procéder au recouvrement amiable ou judiciaire de toutes créances et, dans les lieux où il n’est pas établi de commissaires-priseurs judiciaires, aux prisées et ventes publiques judiciaires ou volontaires de meubles et effets mobiliers corporels. »
Par ailleurs, l’article 19 du décret n° 56-222 du 29 février 1956 pris pour l’application de l’ordonnance n°45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers précise que « lorsque les huissiers de justice procèdent aux prisées et ventes publiques de meubles et effets mobiliers corporels, ils doivent se conformer aux lois et règlements relatifs aux commissaires-priseurs judiciaires, mais sous le contrôle de la chambre régionale des huissiers de justice. »
En conséquence, et uniquement dans le cas des véhicules vendus aux enchères, la fiche d’identification du véhicule (FIV) est communicable aux huissiers de justice agissant en qualité de commissaires-priseurs judiciaires, sous-réserve de la présentation des autres pièces du dossier.
Un mandataire judiciaire a-t-il un droit de communication des données du SIV ?
Le 2° de l’article L. 330-4 du code de la route autorise un droit de communication dans les conditions suivantes : « Les informations relatives à l’état civil du titulaire du certificat d’immatriculation, au numéro d’immatriculation et aux caractéristiques du véhicule ainsi qu’aux gages constitués et aux oppositions, sont, à l’exclusion de tout autre renseignement, communiquées pour l’exercice de leur mission : 2° Aux administrateurs judiciaires ou mandataires liquidateurs désignés dans le cadre des procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire ou de liquidation de biens prévues par le code de commerce » (articles L. 620-1et suivants du code de commerce).
Un mandataire judiciaire peut donc accéder aux données mentionnées dans le SIV. Il doit joindre, à l’appui de sa demande, l’acte officiel des autorités judiciaires le désignant en qualité de liquidateur judiciaire (provenant d’un tribunal de commerce ou tribunal judiciaire selon l’activité du débiteur, conformément à l’article L. 621-2 du code de commerce). En l’absence de ce document, la demande ne sera pas traitée.
Un notaire peut-il être destinataire des informations relatives au titulaire et à la date de la dernière cession d’un véhicule ?
L’article L. 330-4 du code de la route précise que « les informations relatives à l’état civil du titulaire du certificat d’immatriculation, au numéro d’immatriculation et aux caractéristiques du véhicule ainsi qu’aux gages constitués et aux oppositions, sont, à l’exclusion de tout autre renseignement, communiquées sur leur demande, pour l’exercice de leur mission : 1 ° aux agents chargés de l’exécution d’un titre exécutoire ».
L’article L. 111-3 du code des procédures civiles d’exécution précise que « seuls constituent des titres exécutoires : […] 4° Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ».
En conséquence et conformément à l’article L. 330-4 du code de la route, un notaire peut être destinataire de l’information relative à l’état civil du titulaire mais non à celle de la date de cession du véhicule, et ce, uniquement s’il agit en qualité d’agent chargé de l’exécution d’un titre exécutoire.
Communication des données aux autorités étrangères
Dans quel cadre les données du SIV peuvent-elles être échangées avec les autorités étrangères ?
La communication des données enregistrées dans le SIV aux autorités étrangères de l’Union européenne et, le cas échéant, de l’Espace économique européen, est limitée par les alinéas 9°, 9° bis et 10° de l’article L. 330-2 du code de la route aux trois cas suivants :
- Dans le cadre d’un « accord d’échange d’informations relatives à l’identification du titulaire du certificat d’immatriculation » (comme l’accord bilatéral conclu avec la Belgique, qui a un champ d’application à toutes les infractions routières reconnues dans les réglementations respectives) ;
- Dans le cadre de « l’application des instruments de l’Union européenne destinés à faciliter l’échange transfrontalier d’informations concernant les infractions en matière de sécurité routière », c’est-à-dire dans le cadre de la directive 2015/413/UE du 11 mars 2015 (cf. question suivante) ;
- Dans le cadre « des dispositions prévoyant un échange d’informations relatives à l’immatriculation d’un véhicule précédemment immatriculé dans un autre de ces Etats » conformément à la directive 99/37/CE relative aux documents d’immatriculation des véhicules, ou « au titre de la répression de la criminalité visant les véhicules et ayant des incidences transfrontalières » prévue par la décision2008/616/JAI du 23 juin 2008 concernant la mise en œuvre de la décision 2008/615/JAI relative à l’approfondissement de la coopération transfrontalière, notamment en vue de lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière.
En pratique, les échanges de données ne sont pas réalisés par les préfectures, mais via EUCARIS (European car and driving licence information system) qui relie de manière sécurisée les différents systèmesd’immatriculation des pays européens.
Peut-on communiquer à des autorités et société étrangères les données d’identification des titulaires de véhicules responsables d’infraction dans les États membres de l’espace Schengen ?
L’article L. 330-2 du code de la route prévoit que les informations enregistrées dans le SIV sont notamment communiquées : « 9° Aux autorités étrangères avec lesquelles existe un accord d’échange d’informations relatives à l’identification du titulaire du certificat d’immatriculation ; 9° bis Aux services compétents des Etats membres, pour l’application des instruments de l’Union européenne destinés à faciliter l’échange transfrontalier d’informations concernant les infractions en matière de sécurité routière ».
Pour les pays membres de l’Union européenne, les échanges d’informations peuvent être mis en œuvre dans le cadre de la directive 2015/413/UE (dite « directive CBE »), ou via un accord bilatéral ad hoc (par exemple, avec la Belgique). En l’absence d’accord bilatéral, comme c’est le cas pour l’Italie et l’Espagne, les échanges sont réalisés uniquement dans les conditions juridiques et techniques de la directive CBE :
Seulement pour les huit infractions aux règles de sécurité routière reconnues par son article 2 ;
- Via l’utilisation du système européen d’échange d’information EUCARIS ;
- Par des points de contact nationaux identifiés conformément à l’article 4, soit l’agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) pour la France.
Au regard de ces éléments, il n’est pas possible pour les forces de l’ordre ou les sociétés de recouvrement des contraventions étrangères d’obtenir directement auprès d’une préfecture française la communication des informations relatives aux titulaires de véhicules ayant commis une infraction sur leur territoire.
Il convient dès lors de rediriger les demandeurs étrangers vers leur point de contact national désigné dans le cadre de la directive 2015/413/UE. Par exemple, ces autorités sont la Dirección General de Tráfico (DGT) pour l’Espagne ou le Ministero delle Infrastrutture e dei Trasporti (MIT) pour l’Italie.
Les points de contacts sont disponibles sur les fiches pays du site internet d’Eucaris– en cas de multiplicité d’autorités mentionnées, il convient de retenir celle qui est compétente pour l’application de la Road Safety Directive.
Selon quelles modalités communiquer le statut de véhicules hors d’usage précédemment immatriculés en France et exportés dans un autre Etat ?
Les dispositions du code de la route n’autorisent pas le ministère de l’intérieur à communiquer des informations sur le statut d’un véhicule aux autorités étrangères, sauf dans le cadre défini à la question 1.
Aussi, pour ce type de demande, le pôle national des transferts transfrontaliers de déchets (PNTTD) se met en relation avec le service de la donnée et des études statistiques du MTES, qui gère l’infocentre RSVERO, répertoire à finalité statistiques (alimenté chaque jour par le SIV). Cet infocentre pourra renseigner sur le statut de ces véhicules par le biais de l’information relative aux DID ou DAD qui permet d’établir si un véhicule est entré ou non dans la filière VHU, donc sur son statut de déchet.
S’il s’avère que ces véhicules entrent dans le cadre d’un trafic illicite de véhicules, une réquisition judiciaire via l’ouverture d’une enquête judiciaire en France et/ou à l’étranger permettrait par la suite d’obtenir d’autres informations du SIV, si nécessaire.
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